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ANALYSE DES COMPLEXES DISCURSIFS (ACD)
Illustration rapide des buts, objets et principes de l'ACD.

          Après l'échec partiellement reconnu du projet méthodologique dans l'« histoire des systèmes de pensée » (entre la dépréciation finale de l'ambition méthodologique elle-même par Roland Barthes et l'insuccès commenté de Michel Foucault), l'ACD relève le gant sur la question de la méthode. Extérieurement, on peut la définir, ainsi que Patrick Tort le fait parfois en utilisant des mots qu'il sait approximatifs mais qui réfèrent à des domaines d'activité connus, comme une nouvelle méthodologie pour l'histoire des systèmes de pensée. Ce qui la distingue de l'« histoire des idées » traditionnelle tient d'abord à la définition de son objet : l'objet de l'ACD, ce n'est ni les « idées », ni les « systèmes de pensée », ni les « mentalités », ni le « discours ». L'objet de l'ACD est constitué d'abord par la dynamique des interactions entre un dispositif de forces historiques concrètes et un réseau d'événements discursifs indissociablement reflets et acteurs au sein de situations de « débat » dont la compréhension requiert l'identification de leur enjeu. Ce concept d'enjeu est extrêmement important, car il détermine et contrôle à la fois l'efficacité de la méthode : si l'enjeu d'un thème de discours (par exemple celui des écritures égyptiennes anciennes dans la première moitié du XVIIIe siècle européen) a été bien identifié, la situation trouve son explication cohérente, se laisse analyser dans ses composantes tensionnelles et contradictoires, et permet de comprendre la manière dont s'ordonnent autour de lui les stratégies discursives qui sont intéressées à s'en emparer pour le faire servir à modifier dans le sens qui leur convient l'interprétation ou la réinterprétation du thème.


          Exemple : au XVIIIe siècle, les ecclésiastiques attachés à l'étude des inscriptions et de l'histoire des anciens peuples se rallient en majorité à  l'idée de l'abbé académicien Joseph de Guignes, selon lequel la Chine aurait été une colonie égyptienne. La prolifération d'écrits contradictoires sur l'Égypte et la Chine marque cette période d'une façon singulière. Pourquoi ? Parce que face à la montée du courant philosophique qui plonge ses racines, avec Pierre Bayle, dans la fin du XVIIe siècle, et qui est en partie un courant de contestation des pouvoirs de l'Église, de l'emprise universelle de la religion, et de l'idée même d'une croyance révélée et dogmatique – cette critique ayant déjà produit, chez Bayle précisément, l'idée suivant laquelle une nation d'athées (la nation chinoise) pouvait survivre et atteindre un fort niveau de culture en se passant des dogmes et de l'autorité civilisatrice d'une Église –, les historiens chrétiens de la civilisation cherchaient à retisser la cohérence du vieux dogme diffusionniste et biblique de l'origine unique du peuplement de la Terre en utilisant le terrain même sur lequel ils étaient attaqués – la Chine –, et en se glissant dans l'étroite brèche laissée par le dogme au niveau du récit de l'épisode de Babel. À Babel en effet, les langues furent diversifiées, et les différents peuples se dispersèrent. Mais le récit ne dit rien d'une diversification comparable pour les écritures. Il n'était donc pas interdit aux historiens chrétiens des inscriptions de s'attacher par l'analyse des différents systèmes d'écriture à démontrer que les Chinois, détenteurs également de « hiéroglyphes », provenaient des Égyptiens, se reliaient ainsi aux cultures du bassin de la Méditerranée, et s'étaient simplement différenciés à partir d'un tronc culturel originairement unique. Poursuivant la démonstration, on étendait à la religion elle-même cette interprétation fusionnelle de l'origine (le « figurisme » du Père de Prémare avait, quelque décennies auparavant, jeté les bases d'une telle réunification, suivi en cela par tous les missionnaires), et la Chine se trouvait réannexée historiquement, culturellement et philosophiquement à  la grande source indiquée par la Révélation. Les philosophes tendant à  expliquer au peuple que la religion n'était rien d'autre que de la politique, l'Église répliquait en faisant servir une véritable science des écritures à la démonstration très théologique de leur innocence originaire, et de leur obscurcissement superstitieux par la cupidité du peuple gagné par l'idolâtrie païenne, en atténuant autant que possible la responsabilité des manipulateurs de symboles – prêtres égyptiens ou lettrés chinois (laquelle, si elle avait été fortement reconnue, aurait risqué d'être contaminante pour le sacerdoce chrétien et pour le Christ lui-même en tant que grand utilisateur de figures). Telles sont les grandes lignes de ce dispositif, dont l'enjeu est la survie de la cohérence dogmatique du discours de l'Église sur l'histoire des civilisations et sur la religion elle-même, cohérence dont nul ne mettra en doute l'importance stratégique au cours d'une période où sa fracture est déjà plus qu'une menace. L'analyse fine des discours produits au XVIIIe siècle sur les systèmes d'écriture de l'humanité aboutit à la confirmation parfaite de ce schéma, et ce à un niveau très profond de complexité (voir Patrick Tort, La Constellation de Thot, Aubier, 1981).


          Pour en venir à  la définition de l'ACD, elle repose sur cette caractérisation de son « objet », donnée par Patrick Tort vers 1989, et reprise partiellement par Georges Guille-Escuret dans son article « Tort (Patrick) » du Dictionnaire des philosophes (PUF, 2e édition) :


          Un Complexe discursif est un dispositif dont l'unité n'est ni celle d'un « objet », ni celle d'un « discours », mais celle d'un enjeu autour duquel s'ordonnent des stratégies énonciatives qui s'affrontent suivant des règles identifiables en fonction d'un jeu de forces historiques précis, lequel, se modifiant, modifie du même coup leur comportement et leurs effets, qui rétroagissent à différents niveaux de ce jeu pour en infléchir l'équilibre et le cours. L'ACD intègre une sémiotique des éléments au sein d'une pragmatique des forces. D'une manière tout à fait cohérente, elle se refuse à être simplement une discipline théorétique, mais se reconnaît par nécessité dans le concept d'une théorie-action. Et ce dans la mesure même où elle construit une science intégratrice de la complexité des relations entre les champs de savoir et de pouvoir, et une méthodologie qui n'exclut a priori aucune des grandes matrices ou grilles d'interprétation des phénomènes qu'elle étudie (biologie, sociologie, économie, linguistique, psychanalyse, épistémologie, anthropologie, histoire, etc.). Cette science étant fondamentalement explicative, elle est par conséquent appelée à produire des effets d'élucidation au sein de la société, et non pas seulement dans les limites instituées d'une spécialité historique.

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